Un confinement festif, oui, mais avec modération
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Soirée 2.0 (3/3): Eviter la gueule de bois confinée

Concerts virtuels, “apéros en vidéo”… Le confinement sait se montrer festif. Mais cette période d’enfermement pourrait conduire à certains excès. Elsa Laurent, psychologue et addictologue à Courbevoie, met en garde pour éviter la surconsommation d’alcool.

“Je commence par un petit verre en fin de matinée pour que la journée passe plus vite, puis le soir c’est apéro avec mes colocataires”, avoue Solène, une jeune étudiante confinée à Paris. “La tentation est beaucoup plus forte, c’est un peu un échappatoire pour mieux supporter le confinement, poursuit-elle. Parfois ça peut aller jusqu’à 10 verres d’alcool fort par jour.”

D’autres sont bien décidés à ne pas se laisser entraîner, comme Laurence, une institutrice de 50 ans qui a défini des règles strictes face à un début de laisser-aller : “Chez nous on ne fait plus d’apéro en semaine, seulement du vendredi soir au dimanche soir, avec un petit écart en semaine si ça nous fait plaisir.

Face au confinement, les Français paraissent, pour le moment, plutôt raisonnables, à l’instar de Laurence. Les ventes d’alcool ont baissé de 1,7% lors de la première semaine de confinement, selon le panéliste Nielsen. La tendance pourrait néanmoins évoluer au fil des semaines. Période de limitation des sorties, des sociabilités, de solitude pour certains, le confinement présente des aspects propices à une hausse de la consommation d’alcool. D’autant plus, chez les personnes vulnérables à cette addiction. 

Entretien avec Elsa Laurent, psychologue-addictologue à Courbevoie (Hauts-de-Seine).

Quand on voit se développer le phénomène des soirées à distance via la vidéo, la hausse de moments d’inactivité dûs au confinement, peut-on craindre que cela ne génère des addictions?

E.L : Il ne faut pas confondre prise d’alcool et addiction. Ce ne sont pas quelques soirées via la vidéo qui vont mener à l’alcoolisme. Je ne pense pas que les personnes confinées se mettent plus de cuites actuellement. Je dirais plutôt que cette période est propice à l’addiction à la nourriture, pour combler le temps et faire face à l’ennui car elle est facile d’accès. Il faut donc rester vigilant pour ne pas développer de troubles alimentaires.

Qu’en est-il des autres addictions? 

Je pense que le confinement peut réduire certaines addictions. Le cadre de restrictions des déplacements rend, par exemple, beaucoup plus difficile l’accès à certaines drogues qui vont donc être moins consommées. 

Quelles sont les personnes les plus vulnérables à une surconsommation en période de confinement?

Ce sont les personnes qui présentent déjà des troubles. Cela peut correspondre à plusieurs facteurs: la dépression, la solitude, des personnes encore plus isolées… Néanmoins, une addiction se vit souvent seul. Et le confinement se fait pour beaucoup en famille. Il peut donc participer à repousser ces addictions dans un contexte où ces personnes vont être plus protégées et dans un cadre moins propice à la consommation. 

Quels conseils donneriez-vous pour éviter les excès?

Consommer avec modération, comme toujours, pouvoir se cadrer, se limiter. Il faut s’imposer certaines règles: se réveiller à la même heure chaque jour, s’inscrire dans des rituels et avoir une activité sociale et intellectuelle. En clair, il faut rester créatif, ne pas s’isoler et garder un rythme de vie. Et au besoin, les psychologues continuent à travailler.*

*Une ligne d’écoute a été mise en place par un réseau de psychologues bénévoles : 09 74 191 800.

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Propos recueillis par B.S.